«Attention. Cette exposition n’est pas une exposition politique. Merci de votre compréhension.»
Notre époque contemporaine connaît aujourd’hui de multiples sujets de tensions, est en proie à de violents affrontements, de la guerre en Ukraine à la flambée des nationalismes partout dans le monde. Militia, œuvre phare et magistrale de l’exposition donne à voir deux militaires se serrant la main. S’agit-il d’un armistice ou d’une paix blanche ? Les deux hommes appartiennent à l’armée mais leur uniforme qui renvoie à des époques différentes semble signifier que le passé hante beaucoup plus qu’on ne le croit le présent dans une concaténation toujours plus frénétique. La maxime manuscrite sur la toile Forward the Revolution semble être une mise en garde. Les peuples vivent et meurent mais les guerres sont toujours les mêmes, initiées pour les mêmes revendications territoriales, nationalistes, économiques…
Le temps cyclique de l’Histoire comme celui de l’humanité est un éternel recommencement après son extinction. Les États modernes tout évolués soient-ils n’apprennent rien de leurs erreurs et des pertes humaines. L’Histoire semble condamnée à se répéter car « l’homme est un loup pour l’homme » selon la théorie de Hobbes pour qui l’être humain ne pouvait que s’en remettre à une toute-puissance tutélaire en qui il délègue ses droits et qui lui adjuge ses devoirs. Les États d’aujourd’hui se sont substitués à ce Léviathan hobbesien.
Le va-et-vient que fait Eser Gündüz dans ses recherches entre passé et présent, forme et écriture, peinture dans la tradition de l’histoire de l’art et œuvre créée par intelligence artificielle, l’inscrit dans une démarche d’art total atemporel et universel. Chaque élément de ses compositions répond à une nécessité formelle ou de structure, ce que l’artiste nomme la « morphologie architecturale ». L’artiste est un esprit libre et visionnaire. Le message qu’il transmet se fait par détournement des objets et des concepts. Ainsi, il offre au spectateur la possibilité de reconstituer le message et d’élaborer son propre questionnement.
Clotilde Scordia